♫ ♪ ♪ ♫

Pour des raisons professionnelles, Ryan est rentré à Londres juste après la seconde tâche du tournoi. Il est revenu en Portoloin après une lettre de son secrétaire, lui demandant de venir traiter les dossiers qui s’empilaient. Le voici seul, dans la grande maison qu’il occupe généralement avec sa femme – cette dernière étant toujours en Russie.

Assis dans l’ombre, Ryan restait seul sur son lit. Il avait fermé les yeux dans ce moment de recueillement, dans ce requiem. Depuis quelque temps, l’ancien ministre avait jugé bon de se tourner vers dieu, afin de l’aider dans cette passe plus que difficile. Seul le jour qui commençait à naître venait éclairer la grande chambre, et la jonction des deux rideaux pourpre coupait d’un trait parfait le corps de Ryan. Le soleil était déjà levé sur la capitale anglaise – ou devrais-je dire Européenne ? Il fut alors temps de se lever, afin de ne pas être en retard. Le corps s’allongea afin de se mettre debout, et le grand colosse se mit en marche. Dans la maison, pas un bruit. Il avait pris l’habitude de marcher à pas de loup, afin de ne réveiller personne lorsqu’il rentrait tard ou commençait tôt son travail. Les odeurs qui régnaient dans les pièces différentes qu’il traversait étaient pour lui en réel souffle de chaleur et de réjouissance. Il n’était plus baigné dans l’odeur de la mort, dans celle du froid et du sang. Tout était devenu chaleureux, comme dans un voyage où tout serait comme en suspens, mi réel, mi paradisiaque. Le contraste était tel qu’il serait resté des jours entiers dans cette maison, rien que pour son odeur. Il prit alors son café, quelques toasts et des œufs, puis il retourna dans sa chambre, n’osant pas troubler le calme que seuls les oiseaux aux fenêtres venaient rompre. Comme à son habitude, il s’habilla, regarda sa robe de sorcier parfaitement mise et tourna quelque peu afin de voir si rien ne venait troubler ce qui devait être parfait. Il se redressa, ouvrit enfin les rideaux et contempla le ciel beau parsemé de nuages qui s’offrait à ses yeux. Le plus grand des astres l’éblouissait, et c’était au prix de maints efforts qu’il le regardait. Il ouvrit la fenêtre donnant sur le par cet prit un grand souffle d’oxygène. Il fronça légèrement les sourcils, prit son masque de travail – sévère, froid et ennuyeux – puis il sortit de chez lui, pour se rendre au ministère.

Dans les rues de Londres, aucun sorcier qu’il ne croisait d’habitude. Aleanore, Prosper… Alban ? Ciel ! Aucun de ces gens là, qu’il gratifiait en guise de bonjour d’un signe de tête ne vint croiser son chemin. Il ne se rendit compte que plus tard que sa montre était toujours à l’heure russe, et qu’il n’avait aucune idée de l’heure qu’il était. Il décida de faire un détour par un pub, afin de pouvoir lire une horloge. Il était exactement neuf heures et demie. Ryan sentit dans ses entrailles en souffle de soulagement. Ils étaient tous au travail, à cette heure-ci. Droit comme un i, il s’avançait dans les rues, comme un fantôme ne touchant pas le sol mais glissant dessus. Tellement de fois il avait battu le pavé de ces mêmes ruelles, impasses, qu’il en connaissait tous les détails. Il aurait pu faire le chemin les yeux fermés. S’inclinant d’un côté ou de l’autre afin d’épouser les courbes abruptes du trottoir, il fini enfin par arriver aux toilettes publiques. Lorsqu’il fut ministre, il avait la possibilité de prendre directement de chez lui la cheminée, mais maintenant, ce privilège lui était proscrit. En quelques secondes, il arrivait dans l’atrium. Au début, il ne vit pas qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Habitué à ne regarder personne et à traverser l’atrium sans se soucier d’autre chose que de sois même, il s’avança sans regarder le sol… Jusqu’à que la grande statue qui se trouvait au beau milieu ne finisse pas l’attirer.

Stupéfaction ! Colère ! Indignation ? Sainte vierge, pensait-il, qu’est-ce qu’ils ont foutu ? Et lorsqu’il contourna la statue, les yeux rivés vers elle, le désastre vint à ses yeux. L’horreur recommençait, encore. Horreur ? Comme ce sang fut beau, pourtant. Comme l’était celui de Paula,… Seulement, tous ces gens n’étaient pas aussi beaux qu’elle. Ô vestale, comme ils sont laid, à côté de toi ! Ryan contempla pendant de longues minutes, qui paraissaient des heures, ces cadavres. Tantôt sur le ventre, tantôt sur le dos, certains avaient explosés, certains étaient intacts. Une diversité de morts qui suscitaient l’admiration du spectateur. Si l’organisation commettait des actes atroces, elle avait au moins réussit à procurer un sentiment à Ryan qu’il ne connaissait pas. Puis, le bras de la statut tomba juste derrière le seul homme debout. Dans ce silence de plomb, le marbre qui vint se détruire raisonna, et procura à Ryan une telle peur qu’il sortit de sa torpeur, tirant sa baguette. Il fallait qu’il agisse, mais pourquoi faire ? ah ! Matvei.

« Spero patronum. Ceci est un message pour monsieur le ministre, de la part de Ryan Foreston. Trouvez le et dites lui de me rejoindre au ministère. Ceci est d’ordre capital. »

Comme il était beau, le Ministre, au banquet célébrant la fin de la Seconde Tâche ! Tout s'était bien déroulé, sans attaque quelconque ou mort d'homme, tout avait été merveilleux. Les joues rougies par l'alcool et les regards échangés avec Pénélope, rien ne pouvait prédire la suite des évènements. La suite de cette soirée qui, pourtant, s'était annoncée en merveilleux moments, à commencer par ses égarements physiques avec la directrice de Beauxbâtons. Rien de prévu, une surprise de taille, l'air faussement coupable quand Avdotia était venue les chercher, mais une joie impossible et un bien-être apaisant. Quelque chose qui calmait toute la fureur qu'il avait en lui, toute cette frustration qui suivait ses déboires amoureux avec Allis. Un verre de plus, oui, bien sûr ! Et qu'on le resserve de ces délicieuses nourritures qui étaient propres à son dangereux pays, qu'on lui donne encore du Monsieur le Ministre, qu'on le félicite de la sécurité mise autour des champions, de son entrevue réussie, de son calme olympien, de son sourire épanoui, qu'on admire son aisance dans le climat, qu'on l'aime.
Oh oui, il avait tant besoin d'être aimé.
Le Russe prit son nouveau verre de vodka et le cala cul-sec, insensible à l'alcool qui coulait dans son gosier, habitué à en boire depuis sa jeunesse. Ô délicieuse culture étrangère. Son bras était autour des épaules de sa soeur Avdotia, invitée d'honneur à cette table et bras droit du Ministre lui-même, et il riait aux réprimandes basses qu'elle lui faisait face à ses activités précédentes dans le bateau de l'école. Il était joie, ce soir.

Soudainement, dans un rugissement sonore, un lion d'argent et de fumée atterrit sur la table, juste devant lui, le faisant sursauter. Par Grindelwald ! Le lion ouvrit la gueule et, dans une voix qui était celle de Ryan, celle mille fois reconnaissable de l'ancien Ministre, dit :

« Rejoignez-moi au Ministère. Ceci est d'ordre capital. »

Il ne le sentait pas.
Le lion s'évapora, créant le silence dans la salle de banquet. Alarmé, le Ministre se leva de son siège sans plus de cérémonie. Pas question de prendre ceci à la légère : Foreston n'était pas homme à rigoler avec ce genre de chose. C'était donc sérieux... et même dangereux. La dernière fois qu'il était venu le chercher, il avait trouvé le corps de Paula.
Ô douleur.

« Sperro Patrronum. Ce message est pour Rryan Forreston. Dites-lui que j'arrrrive dans les plus brrefs délais. Le renard d'argent, son patronus, hocha la tête et disparut dans une course folle. Un regard vers Avdotia. Toi, tu rrrestes ici. Si je te vois au Ministèrrre, je t'arrrache la tête. »

Pas rien de plus et l'homme partit rapidement de la table, se dirigeant vers la salle où il savait qu'il pouvait trouver les Portoloins qui menaient directement en Angleterre, à quelques pas du Ministère. Il avait besoin d'arriver rapidement et il avait beau être un puissant sorcier, il ne pouvait risquer un transplanage aussi long et risqué. Pas alors que ça chiait au Ministère. En quelques enjambées rapides, le sorcier arriva à la salle, l'ouvrit d'un coup de baguette, puis attrapa le premier Portoloin à portée de main -une vulgaire chaussure- et disparut.

Le voyage fut court, nauséeux, et il atterrit brutalement dans la ruelle jouxtant le Ministère. En plein jour ? Ah, oui, logique, en fait... Grommelant, le sorcier se dirigea vers les toilettes publiques. Il détestait cette entrée, mais bon, puisqu'il le devait... L'arrivée dans l'atrium fut brutale.

Trop.

La bouche ouverte de surprise, le Ministre était arrivé au milieu de ce champ de statues et de morts, de ces flaques de sang, et les yeux posés sur Ryan, seul au milieu du désastre, il ne sut que faire. Ils étaient encore là, tous les deux devant le massacre, encore une fois impuissants devant la laideur qu'imposait le monde. La laideur que l'Organisation jetait, semait dans le monde, plus immonde que tous les monstres... Il arriva aux côtés de l'ancien Ministre, reprenant contenance, et sortit sa baguette de la poche de son pantalon noir, très droit, très officiel, prêt à attaquer n'importe qui viendrait se jeter sur lui. Sur eux. Sur son Ministère, encore une fois.
Pourquoi donc s'était-il entêté à vouloir devenir Ministre dans un tel climat de chaos ?
Pas un geste pour sauver les gens étendus au sol, que ses yeux trop clairs dans ceux de Ryan.

« Tu as vu quelqu'un ? »

Pas de place pour les ronds de jambe, ici, ou les officialités : place à l'action.

Une bataille avait fait rage. La nuit comme la journée qui l'avait précédé avait été longue. Les sortilèges, lancé de tous les côtés, avaient ravagés le Ministère. C'était tant mieux. Ainsi, à son retour, le Ministre serait paniqué. D'un côté, une prophétie volée. De l'autre, le chaos régnant dans son antre. Une bonne partie des membres de l'Organisation étaient partis, mais une majorité restait. Il fallait encore combattre. Malgré le nombre important de combattants, il y avait eu peu de morts. Du moins, pour le moment. Tout n'était pas joué. Plusieurs avaient fuis. Seuls les plus braves restaient. Chargé de la défense, ou plutôt de l'attaque, le 19.3Z1.3 fut appelé à monter. Le Ministre était là. On faisait confiance à 19.3Z1.3, sachant qu'il était bien entrainé. Sachant aussi qu'il était un des membres les plus importants de l'Organisation, l'envoyer contre le Ministre était risqué. On était confiants. Sans même hésiter, 19.3Z1.3 laissa derrière lui le reste de son équipe pour aller faire face à leur ennemi premier : Matvei Sejdic. Le problème était qu'il n'était pas seul. Foreston y était également. À lui seul, il aurait pu maitriser les des opposants. Il s'en savait capable. On préférait tout de même qu'il soit accompagné. Les autres membres de l'Organisation étaient bien assez déjà pour combattre ceux qui restaient.

D'un mouvement brisque, il agrippa le bras d'un de ses collègues pour le - ou la - trainer avec lui. Il n'en avait rien a foutre s'il/elle voulait le suivre ou non. Il/elle le ferait, tel qu'il en avait décidé. Sans attendre, il transplana jusqu'à l'étage où se trouvaient les deux Ministres - l'actuel et l'ancien. Par chance, il était arrivé derrière, un peu à l'écart des opposants. Il relâcha sa prise sur le bras de son accompagnateur avant de lui dire un simple : « Je prends le Ministre ». Rapidement, il se mit en marche, baguette à la main, en direction de Sejdic. Rendu à une certaine distance de lui, pour ne pas prendre le risque qu'il se retourne avant, 19.3Z1.3 lança deux sortilèges imprononcés. En évitant de parler, il commençait par un effet de surprise, et de plus, cachait son origine. Était-il anglais ? Français ? Russe ? Italien ? Pour l'instant, seuls les membres de l'Organisation le savaient. En deux coups de baguette, 19.3Z1.3 exécuta un Expelliarmus ainsi qu'un puissant Everte Statim, dans le but de projeter le Ministre sans défense au loin. Un léger rire de satisfaction suivit le tout. Il aurait pu faire bien pire. Un Endoloris, peut-être. Ou le maléfice de mort... Simple et efficace. Quoi qu'il ne l'avait jamais utilisé en soit.
Non, ça aurait été moins plaisant. L'idée de devoir affronter le Ministre dans un duel lui plaisait bien. De quoi faire voir à tous que celui qu'ils avaient nommé au pouvoir n'était en fait qu'un bon à rien. Le monde magique allait-il enfin ouvrir les yeux. Tout cela était ridicule. Le tournoi, les dépenses inutiles, le nouveau Ministre, tout. Rien de tout ça devait continuer. Un Ministre mort, vaincu de la main d'un membre de l'Organisation, tout pour faire douter le peuple. Ne manquait plus qu'à espérer que l'accompagnateur de 19.3Z1.3 n'occupe bien Foreston, qui restait encore un boulet de plus. Un obstacle à tout avancement possible du monde magique.

♫ ♪ ♪ ♫

La Camarde marchait autour de ses semblables étendus par terres. Qu’espérait-il, l’oiseau de mauvais augure ? Peut être reconnaître un des siens, ou plutôt ne pas le reconnaître. Les trompettes de l’enfer sonnaient et lui, seul vivant parmi les morts, regardait d’un œil mauvais tous ces cadavres. Pourtant, la vue du sang le remuait. Il était transporté de douleur, mêlé à du plaisir intense. Jamais rien ne lui avait procuré autant d’effet que la vue du nectar sacré des vampires. Ah ! L’ambroisie des Dieux ! Comme il en raffolait. Tantale, pourquoi es-tu Tantale ? Et dans les ténèbres de l’atrium, vide de bruit, vide de vie, vide de souffle, l’azur d’un patronus vint colorer et donner à ce paysage d’enfer des airs de paradis. C’était Matvei ! Qui d’autre ? Sa voix était la sienne. Il l’aurait reconnue entre mille. Se hâtant d’être encore seul, Ryan se délecta une dernière fois de cette vue sanglante afin de puiser ses forces pour la suite. Enfin, après de longues secondes, le vivant trouva son semblable, qui arriva en portoloin. Ah ! Quel combat, la vie contre la mort ! Mais cette armée de cadavres – s’ils se réveillaient – serait plus puissante que les deux ministres. Quoi ? Oui ! Toujours les hommes rejette la force mortuaire, mais à quoi bon ? Les armées d’inféris ont montrés leur puissance, par le passé, et leur force. Alors, sûrement Matvei voudrait partir d’ici, s’enfoncer plus avant dans le ministère. Au loin, on entendait des bruits, parfois. De gros chocs qui résonnaient. Etaient-ce les vestiges d’une bataille passée ? Ou les ravages d’une actuelle ? Qui pouvait savoir. Il faudrait se rendre sur les lieux.

Le lien qui unissait les deux hommes était fort. Ryan avait connu Matvei dans de pareilles circonstances, et leurs retrouvailles, encore, se déroulaient au milieu de sang et de mort. Toute cette mort glaçait les corps des vivants. Que l’endroit était horrible ! D’ordinaire si vivant, l’atrium était vide. Posant sa main, encore, sur l’épaule du ministère, Ryan lui communiqua, encore, sa chaleur. Nous sommes vivants, nous sommes vivants ! Il ne fallait pas désespérer. Pourtant, le scénario se répétait, encore.

« Tu as vu quelqu’un ? »

La main qui se trouvait sur son épaule glissa et le bras redevint ballant. Il sentit son regard sur lui, et se contenta d’hocher la tête en signe de négation. Personne, si ce n’est tous ces pauvres gens. Point de vouvoiement, les épreuves rapprochent. Alors, l’amitié se tissait autour de malheurs, autour de tristesse. Etait-ce vraiment le mieux ? Ils ne choisissaient pas. Mais peut-être n’auraient-ils jamais sympathisés, si tout ceci n’était pas arrivé. Un autre bruit retentît dans les profondeurs du ministère.

« Matvei, on entend parfois des bruits, plus bas. Il faudrait… aller voir. »

C’est en disant ça que l’ancien ministre entendit quelque chose qui semblait être un murmure. Il fronça les sourcils, pensant que ça venait de derrière, et sortit lentement sa baguette. Dans un tourbillon de tissu – n’oublions pas qu’en hiver, on se couvre – l’homme fit demi tour et vit deux êtres encapuchonnés, avec d’étranges masques. Son cœur se serra. Matvei n’avait sûrement pas entendu, ni même vu ce qu’il se passait. Et du temps qu’il comprenne, il serait trop tard. Deux sortilèges informulés fusèrent en direction du ministre. Le premier fut vite identifiable, et en un coup de baguette, Ryan le fit dévier. Cependant, le second était beaucoup plus difficilement reconnaissable. Il fallait donc user de vigilance, et offrir au ministre un bouclier puissant. Sa baguette fut pointée sur le côté, offrant un barrage entre le corps de Matvei et le sort qui arrivait en hâte sur lui. Les quelques lumières formaient des couleurs chaudes sur les murs, mais rien n’arrivait à réchauffer l’atmosphère.

« Sainte vierge… »

Quatre sorciers : deux membres de l’organisation, deux membres du ministère. Qu’espéraient-ils ? Que les cadavres des ministres retrouvent ceux des autres membres du ministère ? Ah ! Mais c’était ignorer que, lorsque l’on est ministre, il convient que l’on soit un redoutable sorcier. Et si, dans le temps, des petits êtres fébriles arrivaient au poste suprême, les choses avaient bien changé. Il fallait faire une carrière brillante mais aussi s’imposer lors de duels. Alors, on allait vite voir si les membres de l’organisation étaient triés selon leur force. Les regards se croisèrent, et les rictus mauvais se faisaient face. Tout allait se jouer dans la vitesse et la puissance.

« Sectumsempra ! »

Le sortilège fut lancé en hâte, et Ryan n’eut pas le loisir de viser comme il l’aurait voulu. Alors, il fallait – pour être sur – continuer d’attaquer. Son regard se posa en hâte tout autour de son ennemi. Il espérait voir quelque chose lui permettant de l’attaquer par surprise, mais rien. Il n’y avait rien qui permettait cela… Alors, l’attaque directe était préconisée.

« Incarcerem ! »

Le but n’était pas de tuer, mais bel et bien de capturer. Si les aurors n’avaient pas de cesse de se battre contre du vent, Ryan lui était las. Alors, il interrogerait lui-même ces salopards, et leur ferait avaler leur tripes s’il le fallait. Puis, tout à coup, il le vit. Ou plutôt il les vit. Il comprit comment faire pour que ces gens là arrêtent d’agir. Cela les tuerait peut être ? Il devait y avoir plus de membres en bas, et Ryan aurait le loisir d’en capturer un. Il pointa sa baguette vers le ciel et forma un cercle avec sa baguette. Puis, en continuant ces cercles, il pointa la baguette vers ses deux adversaires. Quelques secondes plus part, des notes se services, à la pointe du museau acérée, descendit en trombe sur les deux hommes masqués.

Le premier geste de son prédécesseur fut de poser sa main sur son épaule, main rassurante qui finissait de lui rappeler le douloureux et sanglant souvenir qui les reliait. Point de réponse à sa question, toutefois, sauf un signe de tête négatif, et cette même main qui retombe et redevient ballante. Immobile. Non, personne de debout, de conscient, de capable d'expliquer ce qui se passait. Il était arrivé ici sans même savoir ce que Ryan lui voulait, mais à voir l'état de l'Atrium, ce n'était pas un bête problème de paperasse ministérielle.

« Matvei, on entend parfois des bruits, plus bas. Il faudrait… aller voir. »

Le Ministre ouvrit la bouche pour répondre, mais un froissement de tissu, infime, le fit se taire. Pas le temps de réagir que Foreston se retourna avec une prestance et une rapidité hallucinante, levant sa baguette pour contrer deux sorts arrivant l'un après l'autre, sans une seconde de répit. Surpris, Matvei se recula d'un pas et leva sa baguette en position de duel. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas pratiqué l'art délicat du duel, cet art tout en mesure et en réflexion, à quelque part entre la pensée et l'action immédiate, mais l'adrénaline qui commençait à envahir son sang et sa tête lui faisait retrouver l'œil aguerri et vif du duelliste. Son sixième sens, son instinct animal, l'avait prévenu une seconde trop tard. Une chance que l'ancien Ministre avait été à ses côtés, sinon, il n'aurait plus eu de baguette...
Deux silhouettes, encapuchonnées jusqu'au cou, et au lieu de visages humains, un masque. Un masque qui faisait froid dans le dos pour tout ce qu'il représentait. Guy Fawkes. Point moldu, il avait tout de même une certaine culture, et tout le monde connaissait un rigolo ayant un jour venir à un quelconque party d'Halloween avec ce masque qui n'avait rien de drôle malgré son éternel sourire. Deux membres de l'Organisation Secrète, manifestement. La Mafia n'organisait pas des raids aussi ridicules, masqués ainsi de surcroît, et ce sens du spectacle ne correspondait pas à de simples criminels. À de bêtes criminels, même. Ces gens étaient là pour faire tomber le Ministère, pour le faire tomber, et il allait défendre cette bâtisse qui était la sienne. Il était le capitaine de ce navire et il allait couler avec lui s'il le fallait. À cette distance, impossible de voir leurs yeux, tout comme aucun d'entre eux n'avait dit un seul mot. Celui qui avait attaqué et plus avancé que l'autre, encore en retrait et inactif. Qu'attendait-il ? La riposte ? La réponse ?

Deux sorts fusèrent de la bouche de Ryan, qui n'hésita pas à les prononcer. Mauvais choix, jugea intérieurement le Ministre. Les sortilèges informulés étaient à préconiser, en ce moment. Il ne remarqua pas le geste de l'ancien Ministre pour faire attaquer les notes de service qui flottaient au-dessus d'eux, trop occupé à réfléchir à son attaque. Finalement, il la trouva. Il avait une baguette puissante, un entraînement fort en magies diverses, un solide passé de duelliste, une mémoire phénoménale pour les sortilèges et, surtout, il avait deux peaux à sauver.

Premier sort, informulé évidemment : Expelliarmus, envoyé non pas sur le premier duelliste, mais sur celui qui avait tenu sa baguette tranquille pour l'instant, suivit d'un rapide et automatique Stupéfix. Si au moins un des deux pouvait être immobilisé... Le troisième suivit dans la seconde après le premier, ne laissant aucun temps de réflexion : Vide-Entrailles. Non, il n'y allait pas avec le dos de la cuillère, mais il n'était pas ici pour s'amuser à capturer des détenus. Il était ici pour se battre et si ce n'étaient pas eux qui mourraient, ce serait lui. Tout simplement. Ce troisième sort fut dirigé vers le premier attaquant, le plus belliqueux peut-être ?, le Russe passant d'une cible à l'autre sans difficulté pour viser. Il avait l'œil entraîné, vif, les mouvements fluides, et seule la suite des évènements allait pouvoir lui dire s'il allait devoir user de ses capacités en magie noire ou pas. Quoique ces personnages masqués ne devaient pas être des enfants de chœur. Déjà, qu'on l'attaque par derrière, ça manquait totalement de classe.
Un regard rapide avec Ryan, puis le bruit sifflant des notes de service qui fonçaient vers les deux silhouettes masquées. Faites que quelqu'un d'autre arrive, ou que ces deux rigolos soient moins doués que prévus.

Mais bon.
Il ne fallait pas se faire de faux espoirs non plus.

Spoiler:

La bataille avait commencé. Les locaux du Ministère avaient été mis à feu et à sang. Tout ceux qui s'étaient moise n travers de leur chemin avaient payé. Personne n'avait été épargné. Ils avaient été sans pitié, sans remords. Parce qu'ils voulaient gagner, ils voulaient faire tomber cette justice magique, faire chuter le Ministre et ses acolytes. Ils l'attendaient, Sedjic. Ils attendaient qu'il ose enfin franchir le pas de son bâtiment désormais en ruine. Qu'il passe l'entrée de l'atrium et qu'il voie les statuts effondrées, effritées, en morceaux sur le sol sombre. Qu'il scrute les corps abimés, ensanglantés qui gisaient ça-et-là, entassés les uns sur les autres parfois, ou bien laissés dans un coin où personne ne les verrait, où ils seraient finalement oubliés. Qu'il sente la mort s'approcher, la défaite jaillir. Le rire terrible des résistants tinter à ses oreilles avant qu'il ne s'effondre, raide. Ho oui, c'est ce qu'ils voulaient tous. C'est ce que 19.SKZ.1 voulait par dessus tout.

19.SKZ.1 allait se diriger vers le département des mystères lorsqu’on lui empoigna le bras avec force. Il eut à peine le temps de tourner le regard vers celui –ou celle– qui l’avait agrippé. Hochement de tête. Déjà ils transplanaient. Toujours cette même sensation d’être compressé dans un tube glacial, obscur. Puis leurs pieds touchèrent terre. Immédiatement ils se mettent à couvert, dans l’ombre, à l’abri de débris de statut. Plus loin, deux silhouettes. Maintenant, il comprenait pourquoi son acolyte l’avait emmené ici. Il les avait reconnus. Il savait quel était leur but. Le Ministre et son prédécesseur. Les haut-placés du bâtiment. Ceux qui devaient tomber pour anéantir le pouvoir. Ils ne les avaient pas vus. Ils étaient trop bien cachés. D’un mouvement silencieux, les deux membres de l’OS sortirent leur baguette. 19.SKZ.1 la pointa sur les Ministres. Son compagnon le dissuada d’un mouvement de tête. « Je prends le Ministre » Dans un souffle il l’abaissa, la gardant contre sa cuisse. Prêt à la relever à la moindre occasion. Ils échangèrent un regard. Un seul. Se redressèrent et d’un même mouvement s’avancèrent vers les deux hommes.

Un seul bruissement de cape avait trahi leur présence. Un bruit infime. Ryan Foreston fit volte face, les toisa avant de dégainer son arme. 19.SKZ.1 et son partenaire pointèrent la leur sur lui et l’autre homme. Matvei, l’actuel Ministre mit plus de temps à réagir. Il se retourna lentement. Trop lentement. Trop tard. Les deux membres de l’OS s’apprêtaient à lancer leurs premiers sorts. Le premier fit des mouvements dans l’air sans qu’aucun son ne sorte de sa bouche. Sortilèges imprononcés. Haute magie. Ryan réagit au même instant. « Sectumsempra ! ». Formule lancée à la hâte. L’esquive ne fut pas difficile. « Incarcerem ! ». D’un geste rapide, 19.SKZ.1 fit jaillir un bouclier de sa baguette, déviant à nouveau le sort. Puis, avec rapidité, il s’exclama. « Stupéfix ! . Dans de grands mouvements, des éclairs de lumières jaillissaient de tous coins. C’était une guerre sans merci. Au final, l’enjeu était de taille. Soit ils faisaient la peau au Ministre et à Ryan, soit c’était eux qui se faisaient capturer.

19.SKZ.1 était tellement concentré sur Ryan qu’il en avait oublié Sedjic. Celui-ci en profita pour attaquer. En instant, il se retrouva désarmé. Des yeux, il suivit le trajet de sa baguette qui alla se perdre dans les débris. Demi-tour. Il se précipita pour tenter vainement de la récupérer. Non, il fut plaqué contre le sol, immobile. Incapable de faire le moindre mouvement. Faible. Il s’en voulait de ne pas avoir réagis plus vite. Il était à la merci des deux Ministre à présent, laissant l’autre Résistant se débrouiller seul avec les deux autres. Attendant que les effets du sort se dissipent. Alors qu’au même moment, au dessus de leurs têtes, des notes folles fonçaient sur eux. Lui écorchant le visage. Lui arrachant un cri.

Impuissant, 19.SKZ.1 assistait en spectateur à la scène.

À peine les sorts fussent lancés que Foreston s'était retourné. D'un coup de baguette, il avait fait dévié le tout premier sort lancé et bloqua l'autre d'un bouclier magique. 19.3Z1.3 resserra sa main sur sa baguette, légèrement vexé. Vu les circonstances, par contre, il n'avait pas le temps pour de telles réactions. Déjà, le Ministre ainsi que son prédécesseur lancèrent à leur tour des sorts à la chaine. L'autre membre de l'Organisation avait également fait son entrée en matière. Celui-ci stoppa sans misère les sortilèges, lancés à haute voix, de Foreston. 19.3Z1.3 le laissait s'en occuper, tendis que lui en finirait avec le Ministre. Du coin de l'œil, le Résistant pu voir la baguette de son accompagnateur voler dans les airs juste avant que celui-ci s'écrase au sol. Preuve irréfutable que les sortilèges informulés étaient les plus efficaces. Sans se retourner, le 19.3Z1.3 lança un Bombarda à la main de Sejdic. Une fraction de secondes trop tard, apparemment, puisque le Ministre l'avait déjà attaqué. D'un coup de baguette rapide, le 19.3Z1.3 fit dévier le sort de justesse.

Tout se passait rapidement depuis le début. Tout comme il venait d'éviter l'attaque du Ministre, son prédécesseur, lui, préparait autre chose, faisant tournoyer sa baguette dans les airs. L'autre membre de l'Organisation stupéfixé, le 19.3Z1.3 se retrouvait seul contre les deux. Voyant très bien que la situation se corsait, il devait agir vite et efficacement. En quelques secondes, des notes de service tracèrent leur chemin en sa direction. Agitant sans attendre sa baguette, le sorcier usa du Feudeymon pour faire jaillir un énorme Magyar à pointes formé de flammes de sa baguette. Le sort étant puissant, ne pouvant être stoppé par de l'eau ni même l'Aguamenti, le 19.3Z1.3 avait l'intention de se débarrasser de ces deux cracmols à la con une fois pour toute. Le faisant voler brièvement dans les airs, il brûla ainsi toutes les dangereuses notes de service. Le tenant éloigné de lui-même, vu sa chaleur extrême, il le fit rapidement contourner les ministres, traçant son chemin face à eux pour se rendre derrière, créant un mur de feu entre les quartes opposants. Alors que le dragon se rendit derrière Sejdic et Foreston, le 19.3Z1.3 lâcha de le contrôler une fraction de seconde pour utiliser l'Enervatum sur le 19.SKZ.1. Puis, le sorcier dirigea le dragon de feu en direction du Ministre de la magie et du Président Sorcier du Magenmagot pour que celui-ci leur fonce droit dessus.

Malgré l'importance du sort qu'il venait tout juste de lancer, le 19.3Z1.3 ne baissa pourtant pas sa garde, sachant très bien que le Ministre était un sorcier puissant, à son plus grand courroux. Le mépris qu'il avait pour cet homme ne changeait rien à sa force et à sa capacité de lui aussi, le vaincre. Mais à ce moment, le membre de l'Organisation était confiant. Il savait que cette fois, le Ministre ne sortirait pas de là vivant. Tel était son désir, il ne laisserait pas un simple manque d'attention tout gâcher. L'Organisation était venue ici pour prendre une prophétie, mais s'il advenait au Ministre de mourir, ça ne serait que plus simple et plus important. Après tout, n'étaient-ils pas en guerre contre celui qui administrait le monde magique ? Contre le ministère, oui. Et comme on en avait contre le ministère, on en avait contre le Ministre. Contre ses choix, contre ses actions, contre lui. Le mettre à mort serait un grand avancement pour l'Organisation, du moins selon le 19.3Z1.3. Tellement que lors de ce duel, il en avait presque oublié la prophétie volée, le but même de leur visite surprise en ces lieux. Rageur, il était fin prêt à s'attaquer au Ministre et mettre fin une fois pour toute à ce duel qui, malgré sa vitesse, semblait s'étirer trop longtemps.

Ombres dansant sur les murs balafrés de l’atrium, le ministère pleurait. En son sein, encore, se déroulait une sanglante bataille. Parfois, des cris venaient troubler l’atmosphère pesant du religieux silence. Petit à petit, le ministère se transformait en chapelle, en église, puis en cathédrale. Ah ! Cathédrale de toutes les méchancetés possibles commises par l’homme. Venir bafouer le temple, la maison de Dieu ! L’orgue inaudible jouait le plus beau de Requiem, celui de Mozart. La puissance avait envahi les lieux. Au plus haut du ministère, une bataille faisait rage. Des lumières, des sons, des bruits. Des cris. Chacun pleurait et chacun saignait. Mais personne ne le laissait paraître, parce qu’il fallait se montrer, devant son ennemi, le meilleur des combattant possible. Chevalier sans peur et sans reproche. Paix ! Le Christ vous le demande, mes enfants. Ryan vous le demande, lui qui maintenant était devenu si pieux. Si bigot. Le champ de bataille était alors mutilé, ruiné, mais la bataille faisait toujours rage. Matvei était entré dans la course, lui aussi. La course à la mort. Tous utilisaient des sortilèges informulés, mais pas Ryan. Il avait toujours pensé qu’ils étaient moins forts, si non prononcés. Alors il y allait comme une brute sanguinaire n’ayant pour but que de tuer, de mutiler. Paix ! Chacun avait un adversaire, et le quatuor devint duos. Oh ! Ciel ! Quelle bataille !

Libérant une puissance extraordinaire, Matvei lança contre son adversaire quelques sortilèges. Mais Ryan, ayant une confiance infinie en son collègue, ne regardait pas ce qu’il faisait. Il se contentait de se battre contre le numéro qui lui avait été attribué, sans son accord. Pourtant ! Quelle fut sa surprise de voir un des sortilèges de Matvei frapper son ennemi. Son propre ennemi, le sien ! Erreur ? Sainte vierge, sûrement pas ! Tactique ! Matvei était un homme de terrain, il n’y avait aucun doute là-dessus. Ryan n’était qu’un bureaucrate zélé, dont le cerveau marchait bien mieux que la baguette. Alors, même s’il se sentait en sécurité face à ces ennemis, il n’en demeurait pas moins anxieux. Si tout dégénérait, alors il ne pourrait rien faire, ses connaissances en magie étaient trop légères. L’homme masqué qui prit le sortilège en plein thorax fut soulevé à quelques mètres de son camarade. Les deux membres du ministère pouvaient à présent se concentrer sur le même ennemi, et même si cela était déloyal, combien avaient-ils été à ravager le corps de Paula, la maltraitant encore et encore ? Ces hommes devaient payer. Ryan allait attaquer quand un grand feu se mit à danser devant eux. Ô indiens, comme votre hardiesse fut grande !

Devant les mouvements endiablés de ce grand incendie, les deux ministres durent reculer. La chaleur qui les faisait suffoquer était trop grande. Un sortilège d’une rare puissance, très difficile à contrôler. Alors, les flammes se mirent à prendre des formes, d’horribles dragons, serpents… Le spectacle aurait pu être beau, s’il n’était pas terrifiant. Derrière ce mur de flammes, Ryan s’aperçu que le lanceur du sortilège se dirigea en hâte vers son acolyte. Dans un dernier espoir, il lança un incercerem, afin que l’homme reste à sa place. Sa baguette lança le sort avant qu’elle ne soit jetée par la queue d’un gros dragon russe fait de feu et d’ombres. Surpris, l’homme ouvrit grand les yeux et se coucha à terre. A quatre pattes, il se dirigea en vitesse vers le lieu où était retombé sa baguette afin de la récupérer. Prit de colère et bafoué dans son ‘honneur’, il essaya de canaliser le sort en formant un bouclier en forme d’entonnoir. Il n’avait jamais été doué en métamorphose, mais son essai fut concluant. Un gros entonnoir de pierre vint protéger les deux ministres. Il ne restait plus que Matvei sache comment arrêter une bonne fois pour toute ce sort.

Ses sorts touchèrent leur cible et il vit, avec une jubilation intérieure, le deuxième membre masqué tomber au sol. Stupéfixié. Comme quoi ses réflexes de duelliste n'étaient finalement pas trop rouillés... Par contre, il ne fallait pas se reposer sur ses lauriers. L'autre membre, l'agressif des deux, semblait plus coriace. Plus belliqueux. Il para le Bombarda d'un geste presque accidentel, comme s'il n'avait rien à faire de ce sort de cour de maternelle, en même temps que l'autre renvoyait son maléfice de Vide-Entrailles. Matvei fronça un sourcil, soudainement, douteux. Ce geste. Ce mouvement. Ce mouvement qui était un miroir de lui-même. Comme s'il se battait contre sa propre personne. Il avait déjà vu cela, il en était certain... mais où ?
Impossible à dire pour l'instant.
Toutefois, la suite des choses jeta une immense ombre dans l'esprit du Ministre, en même temps qu'elle semblait éclairer ce même esprit.

Le membre de l'Organisation encore debout et libre de ses mouvements lança, dans un sortilège informulé et un geste de baguette mesuré, un sort que le Ministre n'aurait jamais voulu voir sortir de cette baguette. Des flammes, des cris, une gueule rugissante de dragon, des sifflements de serpent et la chaleur suffocante d'un Feudeymon. Un Feudeymon. Un sortilège de magie noire d'une puissance énorme et demandant un grand apprentissage de ce type de magie. Les yeux de l'homme masqué qui croisent brièvement ceux, transparents, du Russe, avant qu'il ne fasse cesser le sort qui emprisonnait son compatriote. Ryan qui perd sa baguette et se précipite pour la retrouver, sachant que s'il ne la retrouve pas, la mort est proche. Elle est là.
Mais Matvei, lui, ne bougeait pas. Les doigts crispés sur sa baguette, il ne bougea pas.
Immobile, Matvei laissa les souvenirs l'envahir. Une seconde pour laisser le passé remonter à la surface. Les images de duel, de gestes, de mots chuchotés dans son oreille, ou hurlés à la tête d'une personne dont le visage apparaissait lentement dans son esprit. Les paroles. Les mots d'Avdotia, alors qu'ils n'étaient encore que des adolescents, alors qu'elle s'occupait d'éponger son arcade sourcilière fendue, sa joue meurtrie, son oeil au beurre noir, son nez cassé et tant d'autres blessures. Des paroles tout d'abord floues, mais étonnamment claires actuellement dans son esprit à la mémoire phénoménale :

« Вы не будете никогда преуспевать, чтобы наносить поражение друг другу. Вы думаете тот же путь. Вы находитесь в голове друг друга. »
« You'll never succeed to defeat each other. You are thinking the same way. You are in each other's head. »

Vous ne réussirez jamais à défaire l'autre.
Vous pensez de la même façon.
Vous êtes dans la tête de l'autre.
Dans la tête de l'autre.
Dans la tête. De. L'Autre.

Le cri qui sortit de la bouche du Ministre en fut un viscéral, le prenant aux tripes, un cri de rage pure :

« KRUSHNIC ! »

C'était lui. C'était lui et personne d'autre. Ça ne pouvait être que lui.
Un autre hurlement, dans sa langue maternelle, encore plus profond, alors que Matvei levait sa baguette, la dirigeant vers le Feudeymon qui tournait au-dessus de leurs têtes :

« ВЫБРОСЬТЕ ПРОКЛЯТУЮ МАСКУ ЭТОГО БОГА И ПОКАЖИТЕ МИР ГРЕБАНОГО ТРУСА, КОТОРЫЙ ВЫ ! »
« THROW AWAY THAT GOD DAMN MASK AND SHOW THE WORLD THE FUCKING COWARD YOU ARE ! »

Ce n'était plus de la colère. Ni de la rage.
C'était de la haine à l'état pur.
De la haine qui motivait ce cri des entrailles, ce désir de vouloir détruire purement et simplement cet homme masqué dont il était convaincu de l'identité. Si ce n'était pas lui, il était prêt à lui céder sa place de Ministre, même ! Rien ne le ferait changer d'avis, probablement, entêté comme il était, et si ce n'était que des deux combattants qu'ils étaient, il était probablement le seul à pouvoir contrôler tant de puissance noire, il se serait bien jeté sur le sorcier pour le tuer. À mains nues, s'il le fallait. Et retirer ce masque au sourire inquiétant.
Ryan réussit à matérialiser un espèce d'entonnoir de pierre pour les protéger, après avoir retrouvé sa baguette, mais c'était bien inutile. Contre un Feudeymon, il fallait de la magie noire. Il fallait combattre le feu par le feu, tout simplement. Et quand le feu est de la magie noire...

« Rryan ! Assurrre mes arrièrrres ! »

Les bruits de flammes, de feu crépitant, empêchaient sa voix de correctement parvenir jusqu'aux oreilles de l'ancien Ministre, mais celui-ci devait avoir comprit. Il lui faudrait s'assurer qu'aucun sort ne puisse le toucher pendant qu'il allait tenter de maîtriser ce Feudeymon.
Ses yeux trop clairs fixés sur le Magyar de flammes, sa baguette dessus, l'esprit entraîné du Russe prit le dessus sur l'homme. Ne pas penser à Krushnic. Seulement utiliser cette haine, ce dégoût, cette rage, pour réussir ses sorts. Et ses souvenirs qui défilaient à une vitesse folle dans sa tête. Le Feudeymon cherche à attraper ses proies, il est intelligent, ne pas utiliser d'eau, détruit les âmes, se nourrit de tout, les âmes, se nourrit des âmes, se nourrit de la lumière, destructeur, difficile à maîtriser et arrêter, attaquer directement son maître, contrôler, chimère, dragon, tête de serpent, se nourrit des âmes. Les âmes.

La baguette se baissa, soudainement, et se pointa sur l'homme honnit. Le sortilège, il le pensa avec une force impossible, ne se souciant même pas du dragon qui volait au-dessus de sa tête. De la mort qui les guettait avec des cris de flamme. De tout ce qui l'entourait.
Endoloris.
Le sort frappa de plein fouet celui qui contrôlait le Feudeymon, faisant perdre juste un peu de vigueur à celui-ci. De contrôle, également. Juste assez pour la suite des choses. Pour quand il en aurait assez de voir l'homme se tordre de douleur sur le sol, pour quand son esprit serait en paix, pour quand toute sa haine, son réel désir de faire souffrir cette personne masquée, serait finit.
Jamais probablement.
Un rugissement le fit sortir de sa transe et il recula d'un pas, posant ses yeux sur le Feudeymon qui volait vers eux, menaçant et désormais hors du contrôle de celui qui l'avait créé. Une bonne ou une mauvaise chose ? Un regard à Ryan : celui-ci était mieux d'assurer ses arrières, sinon, ils étaient tous grillés... et par tous, ça signifiait tous les quatre.

Toujours pas un mot qui sort de sa bouche, qu'il n'avait ouverte que pour hurler le nom de celui qu'il pensait être leur attaquant, juste des rubans de lumière qui sortent jusqu'à créer un renard aussi immense que le Feudeymon, mais point de feu. Un renard étrangement transparent, comme nébuleux, qui cracha en direction du Magyar, avant de se jeter dessus. Les âmes. Un Feudeymon avait le même but que le Détraqueur, version son et lumière : se nourrir des âmes, les absorber. Il fallait donc le combattre avec sa propre âme, sa propre personne, et risquer de se faire bouffer à grande échelle. Penser à Avdotia, à son baiser avec Allis, ses soirées avec Benjamin, y mettre toute son énergie pour voir cet énorme renard s'enrouler autour du dragon, tenter de l'arrêter, de le faire diminuer et de finalement l'engloutir dans son ventre jusqu'à ce que les deux entités explosent, n'en faisant qu'une.

Spoiler:

Foreston tenta en vain de l'attaquer à son tour, dans le court laps de temps que 19.3Z1.3 avait prit pour réanimer son coéquipier. Aucune contre-attaque ne fût nécessaire, puisque le sort ne l'atteignit point. Le Magyar de feu lui coupant le chemin, il avait dû mal viser, tout simplement. Encore manqué, cher ex-ministre. On ne se doutait pas pourquoi il avait démissionné, lorsqu'on voyait ses techniques de combat. Sourire en coin, toujours dissimulé derrière son masque, le 19.3Z1.3 contrôlait son Feudeymon assez aisément, ce qui le satisfaisait pleinement. D'ici peu de temps, l'endroit allait être ravagé, et le Ministre, mort.
Puis, la voix de Sejdic se fit entendre. Un nom. Il avait crié un nom. Kushnic. Alors, il croyait réellement savoir qui il était ? À cause de son style de combat ? À cause de ses techniques ? Le Ministre ne savait rien sur que se cachait derrière ce masque. Tout comme il ne savait rien sur celui qui l'accompagnait et tous les autres qui envahissaient le ministère, avec tous le même visage. Il n'avait pu échanger qu'un ou deux sorts avec lui. Et avec ça, il saurait de qui il s'agissait. Erreur. Qu'est-ce qui lui disait que les membres de l'Organisation n'étaient pas entrainés. Pour être plus puissants, oui, mais pour tromper également. Il n'en savait rien.
La main du 19.3Z1.3 se resserra autour de sa baguette alors que le Ministre s'adressa à lui en Russe. Gardant le contrôle du dragon qui venait de foncer tout droit sur le mur qu'avait créé Ryan et qui s'était reculé, encore plus furieux, le membre de l'Organisation devait lui aussi garder son calme, ou du moins, gérer la situation. Détachant son regard du dangereux feu qu'il contrôlait, il se tourna à nouveau vers le Ministre. Rompant le silence qu'il avait gardé depuis le tout début, il ne put s'empêcher de répondre aux stupidités que son adversaire proférait.

« Я ЛУЧШЕ УМРУ, ЧЕМ ДАТЬ ВАМ ЭТО ГРЕБАНОГО УДОВОЛЬСТВИЕ ! »
« I'D RATHER DIE THAN GIVE YOU THIS FUCKING PLEASURE ! »

Sa voix pouvait très bien le trahir, mais derrière se masque, elle semblait légèrement différente, et avec tout le bruit que provoquait le feu, il était bien difficile de distinguer une voix d'une autre. Sans lâcher le contrôle de son feudeymon, toutefois, il le gardait légèrement à l'écart, lui faisant frôler les murs du Ministère dans le but de lui faire prendre feu, alors qu'il discutait avec le Ministre. Ses dernière paroles devaient être bien choisies, quand même. Ce n'était pas tous les jours qu'on tuait une merde haut gradée comme celle-ci. C'est en regardant droit dans les yeux de Matvei, en oubliant presque Ryan, qu'il termina sa phrase, tout aussi haineux que son ennemi avait pu l'être.

« ТАК ГОРИТЕ К ЧЕРТУ, ГОВНЮК ! »
« SO BURN TO HELL, SHITHEAD ! »

Et sans plus attendre, il fit dévier le Magyar à pointe vers Matvei d'un mouvement sec, sachant qu'il allait attaquer également. Le tout se fit rapidement. Très rapidement. Les deux coups de baguettes se donnèrent en même temps, ou à une fraction de seconde près. Le dragon n'hésita pas à entreprendre un virage rapide, alors que le 19.3Z1.3 dirigea son regard vers Sejdic, pour le fixer droit dans les yeux cette fois, presque déjà triomphant. Avant même qu'il n'aie le temps de réagir. Avant même qu'il ne puisse réaliser que son opposant avait lancé un sort au même moment, le membre de l'Organisation sentit la douleur le frapper de plein fouet. À une fraction de seconde près. Pas besoin de se poser la question, le Ministre venait d'utiliser un impardonnable, et ce, de manière parfaitement consciente. Délibérément même. Il ne l'avait pas prononcé, et pourtant, il se faisait presque aussi puissant qu'il ne l'aurait été si prononcé. Le 19.3Z1.3 recula d'un pas, sous le choc, avant de sentir ses genoux fléchir et son corps s'effondrer au sol. Dans sa chute, il fit dévier, sans le vouloir bien entendu, le dragon qui alla directement s'écraser sur un mur. À ce moment, plus rien ne contrôlait la bête, avide de sang et d'âmes, celle de Sejdic la première. Bien que libre de penser, celle-ci perdit en force alors que son créateur cédait sous l'Endoloris.
Le 19.3Z1.3 ne regardait aucunement la suite des choses. Impuissant, il se tordait dans la douleur, tentant vainement de retenir des gémissements face à ce géhenne. La torture insupportable, qu'il n'avait jamais eu à vivre dans sa vie, semblait durer indéfiniment. Ses mains se crispèrent, et le sorcier sentit qu'il ne tenait plus sa baguette. Une chance pour tous ceux qui étaient présents, car s'il avait eu le malheur d'encore l'avoir en main, il aurait aveuglément, presque stupidement, jeté un sort alors qu'il en était incapable, trop occupé à souffrir.

Puis, tout s'arrêta. Faible, le membre de l'Organisation resta immobile un moment, damnant le jour où ce connard était né. Levant les yeux après quelques temps, il put voir Sejdic qui tentait de combattre son Magyar à l'aide d'un patronus. Il allait le tuer. Il allait le tuer. Il n'allait pas sortir d'ici vivant. Il ne pouvait pas. En aucun cas le 19.3Z1.3 accepterait de le voir partir en vie. S'il devait mourir pour l'emporter avec lui, alors parfait. Il le ferait. Mais non, il n'allait pas éviter cette mort. Malgré son manque d'énergie, le sorcier sentait son pouls accélérer, principalement à cause de sa rage. Cette fois, il avait RÉELLEMENT oublié que d'autres étaient présents. Il n'avait rien a faire des actions que son accompagnateur pouvait poser. Il n'en avait rien à faire de Foreston. Il en avait rien à faire du Ministère, de la prophétie et de tout le reste. Fouillant le sol à tâtons, il posa sa main sur ce qui lui semblait être sa baguette magique. Qu'est-ce que ça pouvait être d'autre ? Rien. Sans même s'assurer que c'était le cas, il se releva difficilement mais assez rapidement. Sachant pertinemment qu'il n'avait pas la force d'effectuer le sortilège de la mort, il dû opter pour un autre options. D'un coup de baguette, il jeta un sort qui, dans une longue trainée violette, se lança droit sur le Ministre. Ce sort n'allait pas le tuer. Ce sort allait le faire souffrir un moment, puis il l'achèverait ensuite.
Ce qu'il ne s'était pas attendu, c'était que Foreston s'interpose. C'était que l'ex-ministre se sacrifie pour le présent homme politique. Décidément, Sejdic n'était pas près de mourir...

Spoiler:

Stupéfixié, 19.SKZ.1 était condamné à assister à la bataille en spectateur. Il s'en voulait. Se trouvait incroyablement idiot de s'être fait avoir par un sortilège aussi simple. Aussi enfantin. Son acolyte était seul à présent. Seul contre les deux Ministres. Pourtant il se débrouillait bien, très bien. Les trois adversaires menaient une guerre acharnée. Aucun d'eux ne laisserait l'autre s'en sortir vivant. Sedjic et Foreston lançaient des sortilèges à la chaine que le membre de l'OS déviait avec facilité et sans un mot. 19.SKZ.1 se sentait inutile. Pourquoi avait-il été amené ici si ce n'était que pour passer pour un figurant ? Dans son coin, il s'énervait. Essayait de bouger, de se défaire de ce sortilège qui le clouait au sol, sans défenses. Sa baguette n'était qu'à quelques centimètres et pourtant, ses doigts ne parvenaient pas à l'atteindre.

Plusieurs sorts furent dévié de justesse. Sous ses yeux les éclairs de lumières fusaient à une vitesse alarmantes. A de nombreuses reprises, les maléfices le frôlèrent de peu, lui arrachant un sursaut. Son coéquipier lutait de toutes ses forces, se battait avec la rage d'un dragon. En parlant de dragon, celui-ci fit apparaître un Feudeymon du bout de sa baguette. D'un mouvement simple devenu presque naturel, il le fit tournoyer autour des deux Ministres, brûlant au passage les notes de service qui menaçaient de s'écraser sur les Résistants. Profitant de la panique des deux hommes, il s'occupa ensuite de 19.SKZ.1 en le délivrant des effets du Stupéfix. Celui-ci n'attendit pas une seconde avant de se jeter sur sa baguette et de se remettre dans la course.

En une fraction de seconde, Foreston tenta à nouveau de les atteindre. Mais pris de vitesse par le dragon de feu, sa baguette vola dans un coin et il se coucha contre le sol pour ne pas être brûlé. Les deux membres de l'OS ne lui prêtèrent pas attention, s'occupant du Ministre. La lutte était acharnée. Et tandis que Ryan revenait à l'attaque en faisant apparaître un mur de protection contre le Feudeymon, Sedjic lui, ne bougeait pas. Etrangement immobile. Pendant un millième de seconde, 19.SKZ.1 se demanda ce qui lui prenait. Mais finalement il s'en foutait. Il allait mourir. Il devait mourir. Mais il avait promis : il devait laisser le Ministre à l'autre. Alors il tourna son arme vers Foreston.

Puis un cri retenti. De la bouche du Ministre. Un mugissement de rage et de haine. « KRUSHNIC ! ». 19.SKZ.1 fut bloqué dans son mouvement. Naturellement, il se tourna vers son partenaire. Démasqué ? Impossible, comment aurait-il... « ВЫБРОСЬТЕ ПРОКЛЯТУЮ МАСКУ ЭТОГО БОГА И ПОКАЖИТЕ МИР ГРЕБАНОГО ТРУСА, КОТОРЫЙ ВЫ ! ». Des mots qu'il ne comprenait pas. Du russe. Il haussa un sourcil sous son masque. Bordel, les choses prenaient une tournure bien étrange désormais ! « Я ЛУЧШЕ УМРУ, ЧЕМ ДАТЬ ВАМ ЭТО ГРЕБАНОГО УДОВОЛЬСТВИЕ ! ». La voix du Résistant gronda dans l'atrium. Mais que diable, pourquoi répondait-il ! Souhaitait-il vraiment se faire reconnaître ? « ТАК ГОРИТЕ К ЧЕРТУ, ГОВНЮК ! ». Il avait une soudaine envie de lui lancer un Silencio. Pour qu'il se taise. Mais il n'en fit rien, pensant à leur mission avant tout.

« Rryan ! Assurrre mes arrièrrres ! ». Bien. Il laissa le Ministre et 19.3Z1.3 régler leurs affaires tandis qu'il s'occupait de Foreston. Celui fit disparaître son mur protecteur ; il en profita pour brandir sa baguette. « Everte Statim ! ». Sa baguette fendit l'air dans un bruit tranchant. Ne vérifiant pas s'il l'avait touché, il envoya un Immobulus espérant pour arrêter sa cible. Il s'apprêtait à lancer un autre sort lorsqu'il entendit un cri. Abandonnant sa proie, il fit volte-face avant de se figer.

Son compagnon se tordait de douleur sur le sol, sous la baguette de Sedjic qui lui lançait un regard assassin. Oubliant Foreston, 19.SKZ.1 se précipita sur lui, lançant des sortilèges de Repoussement à tout va, priant pour que l'un d'eux l'écarte du Résistant à terre. Et il réussit. Les hurlements se turent. 19.3Z1.3 se releva, faiblard, pointant sa baguette sur le Ministre. Puis, dans un geste furieux, il fit apparaître une traînée violette sombre qui fendit l'air, en plein sur la poitrine de Sedjic. Mais ce qu'il n'avait pas prévu, ce serait que Ryan se jette en travers du sort...

♫ ♪ ♪ ♫

Sa baguette avait beau être levée contre le monstre de feu, elle ne produisait aucun effet. Et plus le temps passait, plus le sable s’égrainait dans le sablier, et plus Ryan se sentait inutile. A quoi bon essayer de rivaliser ? La magie était bien trop noire pour lui. Qui aurait pu savoir comment un feudaymon pouvait être maîtrisé, en n’étant pas originaire de Russie ? Poudlard s’était toujours évertué à rester du côté blanc de la ligne de démarcation. Et bien que cette représentation manichéenne de la vie le désespérait, il ne pouvait que se rendre à l’évidence. Pourtant, derrière ce grand Balrog de Morgoth, il voyait que la situation lui échappait. L’homme que Matvei avait réussit à mettre hors d’état de nuire se relevait à présent, pour revenir dans la partie. Et dans la confusion, dans le bruit provoqué par les explosions, les sorts, Ryan se surprit à entendre Matvei crier. Il hurlait à la mort des paroles qu’il ne comprenait pas. Il avait seulement entendu le nom d’un professeur de Durmstrang, qu’il ne connaissait pas, mais qu’il avait déjà vu lors de son séjour à Durmstrang. L’avait-il reconnu ? Etait-il celui qu’il pensait, Comment le savait-il ? Tant de questions et si peu de réponses. Il avait envi que tout s’arrête, de tout stopper une seconde, afin qu’un petit conciliabule inaudible entre les deux ministres se fassent. Pourtant, la bataille faisait rage.

« Rryan ! Assurrre mes arrièrrres ! »

Enfin ! Le ministre allait enfin trouver le moyen de se débarrasser de cet horrible monstre. Mais comment ? Il le vit ne plus bouger, se concentrer. Ah ! Un patronus ! Son idée d’entonnoir était bien désuète. Un patronus ! Bien sur ! Pourquoi n’y avait-il pas pensé avant ? Alors, ses yeux fermés par la chaleur virent un magnifique renard contrer le feu. L’âme contre l’âme, la vie contre la mort. Et la chaleur, petit à petit, s’atténuait. Son pauvre bouclier débile disparu. Les sorts commençaient à pleuvoir à nouveau. Ryan s’avança et les para, ou les dévia. Il fallait laisser du temps à Matvei. La puissance d’un le fit reculer sur sa droite. Ses yeux cherchaient les sortilèges que leurs ennemis envoyaient. Il essayait de les reconnaître, mais dans la plupart des cas, il n’y arrivait pas et se servait d’un simple bouclier. Le tout était de ne pas utiliser de magie noire, et il pourrait les contrer.

Enfin, la chaleur des flammes retomba. Plus de feu, le ministère retombait dans le noir et le chaos. Avec le feu s’était étaient, en quelque sorte, la vie. Matvei devait reprendre ses esprits, après s’être débattu contre le sort, et Ryan vit une baguette se pointer vers lui. Il ouvrit grand les yeux et remarqua que l’autre l’était aussi. Deux sortilèges sortirent en même temps des baguettes en direction du ministre. Poussant avec une force inspirée de Dieu sur ses jambes, il n’eut pas le temps de parler, mais simplement de penser… Ou plutôt de prier. Prier pour que Dieu garde son corps en vie. Il passa devant Matvei et reçu en sa poitrine les deux sortilèges. Il fut propulsé à quelques mètres derrière le ministère.

Sainte Marie, Mère de Dieu,
priez pour nous pauvres pécheurs,
maintenant et à l'heure de notre mort.

Il ferma les yeux, sentant alors dans ses entrailles une douleur qu’il ne mesurait pas, un peu assommé par la violence des sorts réunis. Cependant, lorsqu’il reprit ses esprits – en quelques secondes – il se mit à pousser des cris d’une puissance horrible. Il beuglait comme un porc que l’on égorgeait, sentant jusqu’au plus profond de son cœur la douleur. Il avait comme explosé de l’intérieur. Comme un œuf que l’on secoue trop, et dont le jaune s’est mélangé avec le blanc. Il se cambrait sous les assauts de la douleur, mais rien n’y faisait. Son bras gauche était étendu en perpendiculaire de son corps, les doigts écartés, comme s’il voulait en sa main chercher une aide. Il gueulait, toujours et encore, parce qu’il avait mal. Jamais il n’avait reçu le maléfice de Doloris, mais rien, rien n’aurait pu lui faire plus mal qu’aujourd’hui. Il ne savait pas ce que c’était. Il ne savait plus rien. Son esprit n’était plus ici, mais ailleurs, en enfer, près de Satan et de ses fouets qui flagellait les plus impurs des hommes. Mal, il avait mal…

Alors, au bout d’un moment, à force de lutter, l’homme se laissa aller à la brume et aux ténèbres. Il ferma les yeux, sentant sur ses joues perler des larmes. Il tremblait, recroquevillé sur lui, balbutiant des choses inconnues. Il était à moitié mort… Ou vivant, c’est selon.

Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.

Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma douleur, donne-moi la main ; viens par ici,

Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;

Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l'Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.

Il n'avait pas le temps de regarder ce qui se passait réellement autour de lui. Son esprit était totalement concentré sur son âme, qui s'évertuait à se jeter sur le dragon en crachant. C'était bien plus qu'un simple Patronus, bien plus que cela. C'était à quelque part sur la mince ligne entre la magie noire et la magie blanche, c'était à quelque part sur la frontière qui reliait sa haine envers Krushnic à ce besoin de sauver leur peau. Matvei sentait ses yeux le brûler, tout comme sa peau, mais il gardait sa baguette pointée sur l'animal qui représentait son âme batailleuse, protectrice, agressive. Le reste du monde était flou et il voyait vaguement les rayons lumineux se frapper, se contrer, festival de feux d'artifices autour de lui. Seul son esprit semblait encore être totalement dirigé contre le membre qu'il avait torturé, avec un plaisir effrayant. Ce plaisir noir que de voir cette silhouette honnie se tordre de douleur sur le sol, perdre tous ses moyens, ravaler ses paroles hurlées avec autant de haine qu'il avait craché les siennes. C'était lui, il en était persuadé, et même sans preuve autre que son instinct, il le savait.
Subitement, la folie. Ryan se jeta devant lui et se prit directement deux sorts en pleine poitrine, dont un à la couleur que trop familière. Le temps sembla s'arrêter pendant la seconde qui suivit l'attaque, temps qui reprit bien vite lorsqu'il entendit Ryan hurler. Et hurler. Hurler comme si on l'écorchait vif. Comme si on jouait dans ses entrailles. Comme si on le détruisait de l'intérieur. Hurler à rendre n'importe qui fou, y compris lui-même.

Le contrôle de son âme, le Ministre le perdit totalement, au même titre que le membre de l'Organisation -Krushnic, oui, il allait l'appeler ainsi puisque telle était son identité- avait perdu celui de son Feudeymon. Intérieurement, la ligne fut franchie. La ligne qui séparait la raison et la folie, cette ligne qui l'empêchait encore de véritablement tuer ce misérable, bien qu'il le souhaitait depuis longtemps. Très longtemps. Son esprit pensait à mille choses, le faisant basculer dans une sphère dangereuse de sa propre personne. Avdotia, Benjamin, Allis, Allis, mais Krushnic, la haine, le dégoût, la mort. Le renard au-dessus de sa tête se fit encore plus agressif, n'hésitant pas à se jeter à la gorge du dragon qui rugissait, image même de Matvei qui pointait à nouveau sa baguette sur Krushnic, trois derniers mots passant ses lèvres :

« УМРИТЕ, ТРАХАЯ ГЛУПЦА! »
« DIE, FUCKING FOOL ! »

Les hurlements de Ryan.
Les mots d'Avdotia qui tournaient dans la tête.
Les deux puissances qui se battaient au-dessus de leurs têtes, créatures magiques, acharnées, qui s'arrachaient la peau et la vie. Peu importe qu'à l'instant, son âme soit noire, ses pensées meurtières. Il sentait la victoire, le feu qui lentement se faisait dévorer, lui-même qui se consumait sans qu'il puisse y faire quoique ce soit. Ni l'un, ni l'autre n'avait le contrôle de leur création, ni de lui-même. C'était bien le plus dangereux de toute cette situation.
En pagaille, sans qu'il prononce un seul mot -il n'en avait pas besoin pour rendre les sorts puissants puisque la haine était son moteur, il jeta des sorts dont il n'avait aucune conscience. Sa seule cible était l'homme devant lui, dont il ne pouvait voir les yeux à cette distance, mais dont il devinait la noirceur caractéristique. Oh oui, Krushnic, je sens tes yeux noirs posés sur moi, jusqu'au fond de ma tête et de mon coeur. Des sorts et maléfices d'Explosion, de Confusion, de Lance-Flèches, de Brûlure, de la magie noire et blanche en pagaille, tout ce que sa mémoire vive avait enregistré au fil des ans, sans que ne lui vienne l'idée d'utiliser le terrible sort de la mort. Tuer Krushnic ? Oui. Mais jamais de ce si simple sort. Jamais de deux mots.

Il le ferait à mains nues.

Toute notion de défense avait également disparue de son esprit embrumé par la rage. Il ne pensait pas au deuxième membre de l'Organisation, tout comme il ne pensait pas à se défendre contre les sortilèges qu'envoyaient son ennemi avec une hargne grandissante. Attaquer. Toujours. Et si certains l'atteignaient, il ne les sentait pas. Qu'importe le feu, les entailles, le sang. L'adrénaline le faisait continuer et ce fut un Stupéfix bien lancé qui le fit s'immobiliser avec un faciès de haine, tomber au sol, les doigts encore crispés sur sa baguette. Sa respiration était saccadée et la seule chose qu'il constata fut que son adversaire était également tombé au sol. En même temps que lui, miroir de sa personne, image noire de tout ce qu'il haïssait.

Vous ne réussirez jamais à défaire l'autre.

Des bruits autour d'eux, des bruits de pas, et intérieurement, Matvei pria pour que ces bruits appartiennent à des renforts et non pas à d'autres membres de cette Organisation maudite. Et qu'ils ne le laissent pas approcher de Krushnic, s'ils venaient à réussir à attraper les deux membres de l'Organisation présents : il allait se jeter sur lui pour lui arracher la tête. Purement et simplement. Les hurlements de Ryan s'étaient tus, mais il pouvait l'entendre sangloter.

« Attrapez-les ! Emmenez Foreston à Sainte-Mangouste, c'est urgent ! »

Le calvaire prenait fin. Pour l'instant.
À l'intérieur de lui, la vengeance sonnait.

Jamais dans ses souvenirs le 19.3Z1.3 n'avait jeté un sort avec autant de rage et de violence. À peine l'avait-il lancé qu'il regrettait de ne pas l'avoir prononcé. Car ce sort pouvait être mortel, et vu l'impétuosité avait laquelle il l'avait jeté, en aucun cas le Ministre n'aurait survécu, à son plus grand bonheur. À présent, ce détail n'importait que trop peu. Sejdic n'avait pas été touché. Sejdic se tenait toujours là, indemne. Le sort, pourtant, n'avait pas manqué de faire ses effets. Suivant sa trajectoire prévue, celui-ci heurta l'autre. L'ex-ministre s'était porté à son secours, s'interposant entre la lumière violette et la cible. Frappé de plein fouet, Foreston s'était mis à hurlé, alors qu'il gisait au sol. Le 19.3Z1.3 lui offrit un regard des plus noir, qu'il ne voyait sans aucun doute pas, aveuglé par la douleur. S'il souffrait, c'était tant mieux. Aucun rire satisfait, aucune démonstration de joie. Il restait silencieux. À ce même moment, il lui faisait plus que pitié. Parce qu'il avait cru sauver le Ministre. Parce qu'il avait cru qu'en s'interposant, il allait empêcher sa mort. Idiotie. Il ne l'avait que retardée. La rage et la soudaine soif de vengeance du membre de l'Organisation ne s'étaient faite que plus grande, et Foreston avait une part de responsabilité dans tout ça.

La voix du Ministre le ramena à lui, bien qu'il n'avait jamais oublié sa présence. Comme l'oublier suite à ça ? Resserrant sa poigne sur sa baguette, le 19.3Z1.3 eut un léger regain d'énergie, malgré qu'il soit encore et toujours affaibli par la précédente attaque de son opposant. Exactement comme Sejdic, la haine contrôlait, depuis un moment, ses pensées, tous ses faits et gestes. L'envie aveuglante de le tuer, de triompher, ne le lâchait plus d'une semelle. Le Résistant croyait être capable d'atteindre son but, et rapidement. Sejdic, pourtant, avait l'avantage. L'avantage de n'avoir été touché précédemment par aucun sort, encore moins un impardonnable. D'être sans plus ni moins au meilleur de sa forme, ou presque. L'orgueil avait beau être là, le 19.3Z1.3 devait savoir que ses chances de rempoter le duel étaient plus faibles.

Les dires du Ministre résonnèrent presque dans la grande salle, et le membre de l'Organisation ne lui répondit point. Il le fixait, bien sûr, mais ne répondit pas. Reculant d'un par pour être à la hauteur de son coéquipier, le 19.3Z1.3 lui dit, à propos de Foreston : « Achèves-le. » Avait-il le cœur assez à la tâche pour le faire ? En aurait-il le courage ? Aucune idée. Mais s'il pouvait se rendre utile sans lui voler le meurtre de Sejdic, alors il s'agissait de la seule possibilité. Sans attendre de réaction de sa part, il refit un pas vers l'avant, réduisant quelque peu la distance qui le séparait du Ministre. Au bon moment ? En retard ? En avance ? Les choses allèrent trop rapidement pour qu'on puisse le savoir. Ce qu'on sait : Un sort fut lancé pour redémarrer le duel. Dévié de justesse par le 19.3Z1.3, plusieurs autres s'en suivirent, ne laissait pas le temps à celui-ci de contre attaquer. Les sorts fusaient à une grande vitesse, et lui, se contentait de les repousser de rapides coups de baguette. La défensive ne lui plaisait aucunement, car elle signifiait que Sejdic avait le dessus dans cette bataille. Des lumières, du feu, des explosions se faisaient voir, en grande quantité, mais finissaient tous déviés au sol ou sur les murs. Sans s'en apercevoir, le 19.3Z1.3 reculait un peu à chaque sorts jetés et interceptés. Puis, manque d'attention, une flèche vint se planter directement dans son épaule gauche.
« СУКИН СЫН ! AVADA KEDA – »
« SON OF A BITCH ! »

À nouveau frappé d'un sortilège, une explosion cette fois, le 19.3Z1.3 laissa échapper un grognement. N'usant que de défense depuis un moment, il commença à attaquer, plus que vexé. La majorités de sorts s'entre-choquaient, mais un finit par toucher, enfin, son ennemi. Stupéfix, rien de plus simple. Il n'eut tout de même pas le temps de réagir et d'être fier, de le voir au dépourvu, puisque lui aussi fut touché. le membre de l'Organisation se figea, senti sa baguette lui glisser des mains et tomba à son tour. Touchés par le même sort, en même temps, leur duel prit alors fin, sans aucun vainqueur. Rien de plus frustrant pour le 19.3Z1.3. Cette fois, c'était au 19.SKZ.1 d'agir.

Des pas au loin se firent entendre. Des renforts ministériels, évidement. Alors, 19.SKZ.1 devait faire vite, sinon ils allaient tous les deux mourir. À moins qu'il ne soit lâche et qu'il ne le laisse seul. Transplaner était la seule solution à présent. Ils étaient trop pour qu'il ne puisse les vaincre.
Ne restait plus qu'à fuir.
Ne restait plus que l'autre l'emmène avec lui,
N'oubliant pas de prendre sa baguette au passage.
19.3Z1.3 détestait être en cette position de faiblesse
De dépendre d'un autre.

Une seule chose était certaine : S'ils se retrouvaient, Sejdic et lui, il allait lui enlever la vie, et il ne le raterait pas cette fois.